
Histoire
DES ORIGINES GALLO-ROMAINES AU XIÈME SIECLE
Sur ce promontoire stratégique, aux confins des tribus gauloises des arvernes (ancêtres des auvergnats) et des lemovices (ancêtres des limousins), se dressait un poste fortifié destiné à surveiller l’horizon et à protéger, depuis l’époque de la conquête romaine, la voie qui, traversant l’Aquitaine, reliait Bourges à la Garonne.
Au Vème siècle, à l’époque de l’empereur Honorius, une colonie romaine est fondée par un certain SCAURUS AURELIUS d’où sortira, quelques siècles plus tard, l’illustre famille de Scorailles.
767 : prise du premier château par Pépin le Bref et son fils Charlemagne.
Depuis l’an 676, l’Aquitaine se trouve pratiquement indépendante. Ses ducs mènent une politique tout à fait personnelle. Pépin-le-Bref, fils de Charles Martel qui a si bien arrêté l’invasion arabe en 732 à Poitiers, continuant l’oeuvre de son père, veut soumettre la province indocile et la réunir au royaume franc. Il attaque le Duc Waiffre, bien décicé à le pousser dans ses retranchements.
« En 767, au mois d’août, Pépin retourna en Aquitaine ; rendu à Bourges, il tient une assemblée de Francs et, continuant de là sa marche, il parvient jusqu’à la Garonne. Dans ce voyage, il conquiert une foule de positions fortes, entre autres : les châteaux de Scorailles, de Turenne et de Peyrusse. »
Dans cette campagne, Pépin le Bref est accompagné par son fils Charlemagne.
An 1000 : construction du 2ème château
Succédant au « castrum » mérovingien, une deuxième fortification est érigée à quelques centaines de mètres de là, en position dominantes. Elle sera vite entourée d’un village.
C’est en cet endroit, déjà marqué par les évènements que grandit et prospère la famille de Scorailles dont le nom est inséparable de la Haute-Auvergne et de la France.
Alliés aux plus grandes familles, tels les vicomtes de Turenne, Combor, Limoges et Vendatour, les comtes de Périgord et de Rodez, eux-mêmes proches parents des comtes de Champagne, des ducs de Normandie et de Bretagne, des rois d’Angleterre, de Castille et d’Aragon, les Scorailles, dont les armes familiales portent « d’azur à trois bandes d’or », participeront en effet à tous les évènements heureux ou malheureux que connaîtra notre pays au fil des siècles.
1095 : départ de Guy et Raoul de Scorailles pour la Première Croisade
Un grand élan religieux souffle sur le royaume de France. L’Auvergne reçoit l’auguste visite du souverain Pontife : Urbain II, venu présider le Concile de Clermont. La papauté se sent très bouleversée depuis la prise de Jérusalem, tombée au mains des Turcs en 1076. Il faut aller délivrer le tombeau du Christ: « Dieu le veut ! ».
De nombreux seigneurs auvergnats se rallient à son désir et prennent la croix.
Les frères Guy et Raoul de Scorailles suivent le mouvement. Ils se feront vite remarquer par leur bravoure. A leur retour de Terre Sainte, ils ramènent les reliques de Saint-Côme et Saint-Damien, patrons des médecins, qu’ils confient à l’Abbaye voisine de Brageac.
DU MOYEN-ÂGE A LA REVOLUTION
1470-1485 : Construction du 3ème château
L’ascension de la famille se poursuit au fil du Moyen-Âge. Louis de Scorailles, époux de Geneviève de la Roche-Aymon, est un grand seigneur.
D’abord attaché au service du duc de Berry, il défend avec vaillance, en 1421, la ville de Cosne-sur-Loire encerclée par les anglais et les bourguignons. Il sera plus tard conseillé et chambellan de Charles VII, puis sénéchal du Berry et du Limousin.
L’antique demeure familiale tombe en ruine, suite à la guerre contre les anglais qui dure depuis si longtemps, et à une co-seigneurie compliquée.
C’est à Marquès de Scorailles, fils de Louis, que revient la tâche de redonner à sa famille une demeure décente. Plutôt que de remonter les ruines du vieux château, il décide, vers 1470, de se déplacer de 300 mètres au nord et d’en construire un neuf sur l’emplacement d’un ancien vignoble. La période étant encore peu sûre, le nouveau château, dit de La Vigne-Scorailles, sera construit sur le mode défensif, avec tours, chemins de ronde, mâchicoulis et fossés.
1486 : un troubadour chez le seigneur de Scorailles
En cette fin du XVème siècle, la famille de Scorailles jouit d’un grand prestige. Toute la noblesse des environs se presse au château, en cette semaine de Quasimodo (semaine suivant le premier dimanche de Pâques), pour s’y divertir et écouter les chroniques de Christophe Malivoir, troubadour de renom.
1650 : passage de la Princesse de Condé et du Duc de Bouillon pendant la Fronde
Les Scorailles prennent le parti des Princes pendant la Fronde. Fuyant Mazarin et cherchant à rejoindre, par des chemins détournés, Bordeaux, où son mari a des partisans, la Princesse de Condé, accompagné de son fils, le tout jeune duc d’Enghien, fait étape à La Vigne-Scorailles. Elle y sera rejointe par Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne, Duc de Bouillon, et par les ducs de La Rochefoucauld et de Duras, venus escorter la princesse avec un détachement de mousquetaires.
1769 : séjour de Jean-Jacques Rousseau à La Vigne
Le nouveau propriétaire est aussi ouvert aux idées nouvelles et se pique de philosophie. Selon la tradition locale, il invite Jean-Jacques ROUSSEAU à séjourner chez lui. Ce dernier y passera trois mois et composera un herbier dont malheureusement les traces ont été perdues à la fin du XIXème siècle.
L'EPOQUE CONTEMPORAINE
1899 : vente du château de La Vigne
Sa vente, à la fin du XIXème siècle, représente pour La Vigne une profonde rupture dans la continuité depuis l’origine. Dès lors les propriétaires vont se succéder, et les terres se démembrées ou se reconstituer tour à tour.
1912 : reprise et aménagements par Gabriel de Raffin de la Raffinie
C’est juste avant la Grande Guerre que Gabriel de Raffin, d’un vieille famille de Salers, achète La Vigne. Il entreprend, sous la conduite de l’architecte Lemaigre, de nombreux travaux de réparation, de décoration et de confort. Hectare après hectare, il reconstitue patiemment la propriété d’origine du château. Vieillissant, il revend La Vigne en 1942.
1942-1945 : Robert Jégou, accueil de réfugiés et résistance
Le nouvel acquéreur, homme d’affaire du nord de la France, vient habiter La Vigne avec sa famille durant les années sombres de la guerre. L’éloignement du Cantal et ses difficultés d’accès permettent d’abriter discrètement un certain nombre de personnes recherchées par les allemands, et en particulier des israélites qui auront ainsi la vie sauve. Le 14 juillet 1944 se déroule, à une dizaine de kilomètres au sud de La Vigne, près de Pleaux, une des plus vastes opérations de parachutage alliée, baptisée opération « Cadillac », et destinée à fournir armes et munitions aux maquis d’Auvergne et du Limousin qui font là leur jonction.
1951 : acquisition par Georges et Elisabeth du Fayet de la Tour
Les Jégou abandonnent La Vigne peu après la Guerre et c’est en 1951 que la demeure est acquise par la famille qui l’occupe actuellement. Ce n’est pas sans raisons que Georges du Fayet de la Tour et son épouse jettent leur dévolu sur le château de La Vigne. En effet issu d’une très ancienne famille de la région de Salers, Georges descend, par les femmes, des Scorailles. C’est donc un retour de cette demeure à sa famille d’origine. Les nouveaux occupants s’attachent donc très vite à leur nouvelle maison qu’ils remeublent dans son style. La Vigne, inscrit à l’Inventaire des Monuments Historiques en 1966, s’ouvre pour la première fois à la visite du public. C’est une page importante de sa longue vie.
Georges et Elisabeth étant l’un et l’autre décédés prématurément, c’est leur fils Bruno et son épouse, née Anne du Teilhet de Lamothe, qui prennent en main en 1974 le destin de La Vigne.
Depuis lors la famille du Fayet de la Tour s’efforce d’entretenir et d’embellir le château, en développant un certain nombre d’activités économiques et touristiques autour de ce monument historique devenu un des points forts de l’ouest cantalien.